Les réflexions qui suivent sont des réponses à des questions que les enseignants se posent au moment de la préparation de leur classe ou pour gérer la séance avec les élèves quand ils veulent mettre en œuvre la démarche d’enseignement de la géométrie proposée dans cette ressource.
Nous les avons regroupées en quatre grandes rubriques
I. Questions liées à l’enseignement de la géométrie
II. Questions liées à l’enseignement à partir de la résolution de problèmes
III. Questions spécifiques aux situations de reproduction ou restauration de figures
IV. Questions relatives à l’usage du tableau blanc interactif (TBI)
Question 1.a. : Comment faire pour éviter les imprécisions dans les tracés des élèves ? Comment faire pour qu’ils ne fassent pas « d’à peu près » ?
L’enseignant doit être au clair sur ses exigences. Il attend de la part des élèves :
Il faut donc distinguer deux critères d’observation voire d’évaluation : justesse des procédures mises en œuvre et précisions des tracés.
A propos de la justesse des procédures mises en œuvre :
Mise en place d’un contrat avec les élèves : en géométrie « on ne procède pas par tâtonnement », que ce soit au niveau des tracés ou des propriétés utilisées.
On peut par exemple expliquer que l’œil est un outil utile mais peu fiable et qu’il faut donc utiliser les propriétés des figures qu’on peut produire et contrôler avec des instruments.
A propos de la précision des tracés :
Mise en place d’un contrat avec les élèves : expliquer qu’en géométrie on essaye d’être le plus précis possible. Pour cela, on doit notamment : bien préparer son matériel (tailler son crayon, avoir une gomme à disposition…)
Prévoir des temps d’apprentissage pour utiliser le matériel :
Ainsi, au regard des apprentissages visés en géométrie, l’analyse de l’enseignant sur les travaux des élèves doit davantage porter sur la justesse des procédures mises en œuvre plutôt que sur la précision des tracés. Il nous semble donc important de penser une organisation qui permette d’observer les procédures des élèves et pas seulement la production finale.
Question 1.b. : Comment utiliser le papier calque ?
Justifier auprès des élèves l’utilisation du papier calque : si l’œil est un outil souvent utile, il n’est pas assez précis pour pouvoir vérifier son travail. Le calque leur permettra soit de valider leur production, soit de la remettre en question (plus facilement que si l’enseignant corrige lui-même). Ils pourront alors, le cas échéant, s’engager dans une nouvelle recherche. L’enseignant pourra amener les élèves à se demander si les écarts constatés sont seulement dus à une imprécision des tracés ou si c’est la procédure elle-même qui doit être remise en question.
Ne pas laisser le calque à la disposition des élèves pour éviter les réajustements par tâtonnement. En revanche, quand le calque leur est proposé, les laisser le disposer sur leur production (ils doivent repérer comment le poser). Par la superposition opérée, l’élève peut apprécier ses « écarts » (imprécisions ou erreur de reproduction de la figure ou d’une partie) et envisager les corrections qu’il doit réaliser.
Remarque : on pourra épaissir le trait du calque pour ne pas avoir à tenir compte de très légères imprécisions qui ne sont pas dues à des procédures erronées mais bien à des tracés qui peuvent être encore maladroits chez de jeunes élèves.
Question 1.c : Comment exiger des élèves l’emploi de termes précis ?
C’est un travail de longue haleine.
Veiller à chaque instant à amener les élèves à préciser leur pensée. Par exemple, si un élève dit : « on fait comme ça… » ou « on met la règle comme ça » ou « c’est penché » ou « c’est le truc »…vous pouvez répondre : « je ne sais pas ce que c’est "ça" » ou « qu’est-ce que ça veut dire penché » ?…
Veiller à employer vous-même un langage géométrique précis et à étayer les formulations des élèves.
Question2.a. : Que faire si certains élèves sont bloqués ?
Il est nécessaire d’avoir anticipé avant chaque séance les aides à apporter en fonction des difficultés possibles des élèves. Certaines sont précisées dans la ressource. Mais d’une manière générale, on peut aider les élèves en :
Question 2.b. : Que faire si certains élèves ont fini avant les autres ?
Il est utile de prévoir un travail complémentaire pour occuper les élèves les plus rapides de façon que la mise en commun collective puisse se faire à un moment où tous les élèves auront eu suffisamment de temps pour réfléchir sur le problème proposé.
Dans le cas où plusieurs phases sont prévues, on pourrait être tenté de distribuer la phase suivante aux élèves qui finissent avant les autres. Or, on prendrait alors le risque de les faire avancer sans s’assurer de leur compréhension explicite de la notion en jeu. Ce savoir pourrait alors rester intuitif et donc n’être ni mémorisé, ni transférable. Seule la verbalisation permet de faire ce travail d’explicitation. Elle peut s’opérer lors des mises en commun et des échanges entre élèves. C’est pourquoi on incitera les élèves les plus rapides à apporter une aide à ceux qui en ont besoin. On les place ainsi dans une situation où ils doivent utiliser le langage pour aider le copain à poursuivre son travail. Parler sur ce qu’ils ont fait, avec d’autres élèves, leur permet de revisiter leur propre cheminement et d’avancer dans la construction de leurs connaissances.
Question 2.c. : Comment mener la mise en commun ?
Une mise en commun ne peut être une simple correction.
Il ne s’agit donc pas de se limiter à l’exposé de la bonne procédure par un élève, ce qui découragerait les plus fragiles dont les travaux ne seraient pas pris en compte. Au moment de la mise en commun, l’enseignant doit amener les élèves à expliciter les procédures non pertinentes car elles constituent d’importants leviers d’apprentissage. Pour cela, la comparaison de procédures permet de provoquer le débat qui apporte validation/invalidation et justification des démarches. En cas de non réponse, l’enseignant peut faire réagir les élèves en proposant lui-même des procédures erronées.
Une mise en commun, cela s’anticipe.
→ Fixer un objectif à la mise en commun : quelle notion mathématique faire émerger ?
→ Anticiper les procédures à faire comparer aux élèves pour faire émerger la notion en jeu.
→ Analyser l’ensemble des productions pour recenser celles qui sont les plus représentatives et qui seront traitées lors de la mise en commun.
→ Le professeur compare les procédures relevées en fonction de leur économie en temps, leur degré d’expertise, fait un choix parmi les erreurs produites, ne retenant que celles dont une explicitation permet d’améliorer la compréhension collective.
→ Enfin, il repère les élèves à solliciter au moment de la mise en commun en fonction des procédures qu’ils ont mises en œuvre mais aussi en fonction d’autres critères (comme par exemple, donner la parole à un élève timide, valoriser des élèves souvent en difficulté…ou autre…)
Une mise en commun, cela s’organise.
L’enseignant doit "gérer" la mise en commun.
→Le déroulement de la mise en commun n’est pas laissé au hasard. Le professeur ne prend pas en compte les productions trop difficilement interprétables. L’exposé des procédures est gradué commençant par des exemples de non compréhension et de non prise en compte des contraintes données via la consigne ; se poursuivant par l’explicitation de procédures plus ou moins économiques, plus ou moins expertes ; se terminant par l’énoncé de la procédure la plus experte produite. Enfin, cette synthèse débouche sur l’institutionnalisation de la procédure experte prévue par le maître. Cette dernière reprend la dernière procédure tout en la replaçant dans un contexte plus général.
→ Il doit s’astreindre à « laisser le champ libre » (posture dite du « lâcher prise » par D.Bucheton). Il est nécessaire de laisser les élèves aller au bout de leurs échanges. L’enseignant se retrouve dans une situation délicate : donner la prise en charge de la « critique » aux élèves, sans prendre position ni l’assumer à leur place, tout en restant garant de l’essentiel.
→Il garantit la qualité langagière des échanges : les formulations orales des élèves sont très souvent pauvres, les phrases rarement complètes et très marquées par le matériel utilisé et les gestes réalisés, l’enseignant fait reformuler avec une vigilance particulière sur les mots utilisés ; reprend les termes mal employés (coin/angle), demande ou reformule certaines expressions. Cette rigueur doit permettre de clarifier le partage d’objets communs, ainsi que de leurs usages ; l’objectif pour l’enseignant est d’enrichir les formulations des élèves, de les décontextualiser dans le but de faire émerger les notions géométriques visées.
→Il garantit le bon déroulement des échanges sur le plan social : il laisse les élèves se solliciter entre eux et veille à ce que les échanges se fassent dans le respect de l’autre.
→Il veille à ce que l’erreur soit considérée comme une opportunité d’apprendre.
→Il n’est pas le porteur du questionnement.
→Il relance les élèves dont les méthodes ou les résultats sont erronés ; il est possible aussi de demander « ce qui était difficile », « ce qui est à retenir ».
→Il conclut en reprenant les propos des élèves (ou en grande partie car il ne s’interdit pas de donner les mots précis s’ils n’ont pas été dits).
→Il pense à prévoir comment garder trace des synthèses intermédiaires pour alimenter la synthèse finale. (affiche, tableau, photo, cahier… ?)
→L’enseignant doit choisir une suite à la mise en commun. Il peut donc être amené à décider d’une phase de conclusion. Il peut aussi relancer la recherche, avoir recours à une situation voisine destinée à tous, ou bien seulement à certains en effectuant des choix de différenciation.
Question 3.a. : Comment présenter la figure-modèle aux élèves ? Faut-il commencer à l’analyser avec eux ?
Nos observations ont conduit à constater qu’il existe différentes façons de présenter la figure modèle aux élèves :
Question 3.b. : Quelles aides apporter aux élèves, notamment s’ils sont bloqués ?
En cas de production erronée, proposer une vérification avec le calque.
Si les élèves sont bloqués ou ne voient pas leur erreur, on peut les amener à se reporter à la figure-modèle : l’observer, y placer son gabarit, ne pas hésiter à écrire dessus (prolonger des traits…), comparer la figure modèle et la reproduction : qu’est-ce qui est déjà tracé, qu’est-ce qui manque ? Il est important pour l’enseignant de prendre conscience qu’il y a trois figures à considérer (la figure modèle, la figure amorce et la figure manquante) et que c’est amenant les élèves à identifier les éléments de cette figure manquante que l’on peut les aider à organiser la réalisation de leurs tracés.
Question 4.a. : Peut-on utiliser le TBI ?
Oui, mais l’enseignement avec le TBI amène quelques spécificités et quelques différences en termes de gestes professionnels par rapport à l’enseignement « classique » qu’il faut prendre en compte.
L’outil numérique est intéressant dans l’enseignement de la géométrie dans la mesure où il offre des potentialités en termes de déplacements de figures, de mobilité des sous-figures.
Précisons qu’il existe beaucoup de logiciels différents selon qu’il s’agisse de TBI, de VPI ou d’écran interactif et donc des possibilités d’utilisation et de commandes différentes.
Cependant, quelle que soit la nature du TNI ou du VPI présent dans la classe, les gestes de l’enseignant, nécessaires pour l’utilisation de cet outil numérique, doivent être distingués des gestes employés dans la manière « classique » d’enseigner.
En effet, lorsque l’enseignant utilise le TBI et qu’il veut avoir accès aux transformations géométriques que génèrent les activités de restauration avec gabarits (translations, rotations, qu’elles soient simples, ou successives dans le cas des compositions de transformations), il doit exercer une action de toucher sur le gabarit ou faire appel à une commande de logiciel. De surcroit, les gabarits sont placés dans des cadres et ce sont parfois ces cadres que l’enseignant est amené à mouvoir.
En ce qui concerne les tracés à main levée, le recours à une commande spécifique du logiciel est également nécessaire.
Avec le TBI, les pièces utilisées lors des séances (gabarits, figures-modèles) sont placées en amont de la séance, dans un endroit déterminé sur la page présentée collectivement. Ceci n’est pas forcément le cas lorsque l’enseignant se trouve face à un support différent (ce peut être la table de l’élève par exemple).
Lorsque l’enseignant manipule les gabarits, il les prend pour agir dans deux espaces différents, de dimension 3 et de dimension 2. Avec le TBI, les gabarits doivent être manipulés dans un espace plan. Ils doivent rester en contact permanent avec le support-plan du TBI pour pouvoir être manipulés.
Avec le TBI (ou VPI) les gestes de l’enseignant peuvent ne pas être les mêmes que ceux utilisés par les élèves sauf si ces derniers sont amenés à prendre en main le TBI.
Ainsi, nous pouvons conclure que l’usage du TBI facilite la présentation des figures mais les gestes nécessaires à la construction ont des spécificités par rapport aux gestes de tracés avec papier crayon qu’il convient de prendre en compte. Utiliser le TBI pour montrer et pour analyser les figures mais travailler sur les documents élèves agrandis pour montrer les gestes à réaliser peut-être un choix judicieux.
Question 4.b. : Quels peuvent-être les apports du TBI dans le cadre de la restauration de figures ?
Projeter une figure sur TBI peut faciliter son analyse grâce au remplissage de surfaces en couleur ou au tracé de contours avec le crayon. Soulignons aussi le fait qu’il est possible de représenter des gabarits transparents ce qui facilite la production ou l’analyse d’assemblages par superposition.
De plus, les actions réalisées avec le TBI peuvent être enregistrées, y compris les interventions des élèves. Cela permet ainsi une réutilisation ultérieure, voire une visualisation des actions effectuées.